"C'est un roc !... c'est un pic !... c'est un cap ! Que dis-je, c'est un cap ?... C'est une péninsule !"

Publié le 5 janvier 2024 à 16:53

Partie 1: " Connais-toi toi-même"

Notre monde se tisse à travers le prisme des éléments qui nous entourent, que nous pouvons voir, entendre, sentir, toucher, goûter. Chez nos compagnons canins, c'est sans doute l’olfaction qui prend le devant, ce sens fondamental qui les guide à percevoir et comprendre le monde avec une précision remarquable (Mozer et al., 2019).

Bien sûr, nous reconnaissons des différences fondamentales dans ce sens qu’est l’olfaction entre nos deux espèces. Il est vrai aussi que nos amis à quatre pattes nous surpassent dans cette capacité sensorielle.
Si vous parcourez ces lignes, c’est probablement parce que, comme moi, vous partagez votre vie avec une espèce différente de la vôtre.
Que cet être soit étiqueté comme sensible ou non, réactif ou non, il est, à mes yeux, essentiel de tenter de comprendre SON monde.

L’être humain et les chiens possèdent des capacités sensorielles différentes. Même si l’on pourrait penser que cela n’est qu’un détail, c’est en réalité une différence majeure entre nos deux espèces : nous percevons le monde qui nous entoure de manière distincte.

Mais tout cela, vous le saviez probablement déjà. En ouvrant cet article, peut-être pensiez-vous que j'allais vous montrer à quel point nous, humain·e·s, sommes « incapables » en matière d'olfaction. Vous vous attendiez peut-être à des schémas anatomiques comparant l'acte de sentir chez l’humain·e et chez le chien, ou encore à des représentations des mouvements d'un panel odorant. Au risque de vous décevoir : ce n’est pas ce que vous trouverez dans ces prochaines lignes.

En effet, contrairement aux croyances, nous ne sommes pas si médiocres dans ce domaine. Dans la première partie d’un article qui se compose de deux, je vous propose de revenir sur nos propres compétences olfactives, pour ensuite dans un deuxième temps revenir sur celles du chien. Ce première essai a pour but de mettre en lumière que le monde olfactif de notre chien fait également partie de notre monde d’humain·e. Déconstruire ces croyances sur nos propres aptitudes dans ce domaine nous permettra, peut-être, de sortir de la prophétie presqu’autoréalisatrice qu’on ne pourra jamais, ne serait-ce qu’entrevoir, ce que (res-)sent notre canidé.

"Rendons à César, ce qui appartient à César."

Lorsqu'on évoque l'odorat humain, l'idée préconçue selon laquelle nos aptitudes dans ce domaine sont quasi insignifiantes comparées à celles d'autres animaux vient immédiatement à l'esprit. Si l'on s'amuse à interroger Chat GPT sur la supériorité en termes d'odorat entre l'humain et tout autre animal, il est fort probable que le résultat final de son texte penche en faveur de l'animal non humain (à l'exception des animaux marins). Cette tendance n'est guère surprenante, étant donné que Chat GPT tire la majeure partie de ses informations de sites internet, de blogs, d'articles, de forums, etc.

 

En effet, il est communément accepté que le sens de l'odorat humain est moins développé que celui d'autres mammifères, en particulier des rongeurs et des chiens. Encore aujourd'hui, de nombreu·x·ses biologistes, anthropologues et psychologues persistent dans la croyance erronée que les humain·e·s ont un sens de l'odorat très limité (McGann, 2017).

 

Cependant, les recherches actuelles sur la perception des odeurs ont catégoriquement rejeté ce mythe du XIXe siècle, qui minimisait le rôle de l'olfaction chez l'humain·e (McGann, 2017 ; De Groot, 2017 ; Di Cicco, 2023). On reconnaît désormais que ce sens a évolué pour nous permettre d'évaluer les risques environnementaux et influencer les comportements alimentaires (Sarafoleanu, 2009 ; Stevenson, 2010). De plus, l'odorat remplit une troisième fonction cruciale, celle de la communication sociale, nous permettant de transmettre et de détecter des informations par le biais de l'odeur corporelle (De Groot, 2017 ; Stevenson, 2010).

Pour ma part, à la suite de ces diverses lectures, je me suis surprise à tenter de remonter la piste d’un parfum dans la rue, à tenter de trouver sa source. Le vent m’amenant dans de mauvaises directions, j’ai levé le nez un peu plus haut et me suis laissé guider par ce sens. J’ai mis en pratique des connaissances théoriques que j’avais déjà. Et j’ai réalisé que durant toutes mes lectures sur le thème de l’olfaction canine, ces webinaires, ces cours, on représentait toujours le panel odorant avec des couleurs, des photos gribouillées avec des crayons symbolisant l’odeur et sa diffusion en fonction de facteurs divers. Bien sûr, cela fait sens et m’a aidé à imaginer. Mais aujourd’hui je me demande, finalement, pourquoi on ne m’a jamais dit : essaye, tu verras à quel point c’est un exercice compliqué!

Merci à Marie de Dogday pour cette magnifique représentation artistique ;-)

Peut-être que c’est cela, demain, que je répondrai à ces client·e·s qui sont nombreux à me dire que leur ami à 4 pattes doit avoir un problème olfactif. Vous voyez ce moment où un bonbon tombe par terre et que ce dernier cherche dans la direction opposée. L’humain·e, utilisant sa vision, s’écrie que son chien doit être « handicapé du piff » et finalement rappelle son canidé vers la source en pointant du doigt ce bonbon. Peut-être que ce même humain·e, s’iel essayait lui-même de remonter une piste de parfum dans un champ, verrait que parfois, les éléments nous mènent dans la mauvaise direction pour finalement remonter petit à petit vers la source. Peut-être que cet·te humain·e, s’iel essayait par lui·elle-même, ne perdrait plus patience et admirerait même ce sens proche de « super-pouvoir ».

Je vous propose donc, dans un premier temps, de tenter de comprendre pourquoi nous nous sous-estimons dans ce domaine ; revenir en arrière pour comprendre les biais énormes qu’il y a eu durant les recherches passées dans le domaine de l’olfaction. Mêlant histoire, politique et relation à l’animal, cela nous mènera brièvement dans un sujet qui m'anime tant : l’anthropozoologie.


A la suite de cela, je vous propose de revenir sur ce que nous savons actuellement de ces compétences olfactives chez l’humain·e et d’un facteur presqu’insoupçonné : la culture.

Pour ensuite tenter de comprendre ce qu’il se passe parfois inconsciemment grâce à ce sens. Réaliser que notre petit serrage de main à la rencontre d’inconnus, ou même, qui sait, cette « bise », a peut-être en partie la même fonction que ce petit « sentage de popotins » entre congénères. Et enfin et pour finir, se rappeler à quel point ce sens est lié à la mémoire et aux émotions nous permettra peut-être de comprendre que durant un travail de désensibilisation, c’est un sens qui n’est pas à négliger.

 

J’aspire à ce que, comme l’effet qu’ont eu ces lectures sur moi-même, cet article vous permette de vous rendre compte que vous êtes capable d’utiliser ce sens, que cela puisse vous aider à mieux comprendre pratiquement le monde de votre chien. C’est ainsi que dans la deuxième partie, qui se trouvera dans un prochain article, j’aborderai le « super-pouvoir » du chien. Parce que oui, si au final, nous humain·e·s sommes fort·e·s pour ce sens, n’oublions pas que nos chiens le sont encore plus.

L’histoire du bulbe olfactif :

Déjà pour Aristote (-384 à -322 avant J.C), l'odorat était dépourvu de subtilité et de discernement. Cette vision a persisté chez des philosophes ultérieurs tels que Descartes, Kant et Schopenhauer, qui percevaient l'olfaction comme vulgaire, grossière et inférieure (De Groot, 2017).

Pourtant, au XVe-XIXe siècle, les médecins diagnostiquaient leurs patient·e·s grâce à cet odorat ; le diabète - urine sucrée, la diphtérie - odeur sucrée, le scorbut - odeur putride ou encore la scrofule - odeur de bière aigre (Ofosson & Wilson, 2018).

Mais ce sont sans doute les évènements du XIXe siècle qui semblent avoir maintenu ces croyances jusqu’à aujourd’hui. En effet, à cette période, une tension significative régnait entre l'Église catholique et les institutions scientifiques, en particulier avec l'institution académique de Broca. En raison de ce contexte politico-religieux tendu, afin de pouvoir exposer ses théories, Paul Broca-médecin, anatomiste, anthropologue- préférait expliquer les phénomènes liés à l'odorat en analysant les composants anatomiques. En se basant donc sur des faits objectivables et observables : la taille des bulbes olfactifs (McGann, 2017). Cependant chez les humain·e·s et d'autres primates avec des lobes frontaux développés, les bulbes olfactifs adoptent une forme aplatie et se situent en dessous du lobe frontal. En revanche, chez les rongeurs et d'autres mammifères, ces bulbes sont proportionnellement plus imposants et occupent une position proéminente à l'avant du cerveau. Broca en conclu donc que les humain·e·s avaient un sens de l’odorat restreint puisqu’iels étaient dotés de plus petits bulbe olfactif. C’est donc en raison de cette diversité anatomique des bulbes, tant dans la configuration que dans la localisation, que ce mythe sur nos compétence olfactive est devenu, à cette époque : « un fait scientifique ».

 

Freud, qui avait écrit son premier ouvrage sur l'aphasie et s'était donc intéressé à l'aire de Broca (mais c'est une autre histoire), était donc familier avec les travaux de ce dernier. Dans ses théories, il avançait l'idée que la prétendue perte d'odorat entraînait la répression sexuelle chez l'être humain. Il affirmait, entre autres (et j’en passe), que prendre "plaisir à l'odeur" pouvait faciliter les troubles mentaux. Freud hypothétisait : "la diminution des stimuli olfactifs semble... une conséquence de l'élévation de l'homme depuis le sol" (cité dans De Groot 2017). Ainsi, Freud et Broca ont fait naître la croyance que l'odorat, ou plutôt le manque d’odorat, distinguait l’humain des autres mammifères (McGann, 2017 ; Groot 2017). Par le biais d'une série de malentendus et d'exagérations, cette conclusion a progressivement dérivé vers la mécompréhension contemporaine selon laquelle les humain·e·s auraient un sens de l'odorat déficient (McGann, 2017).

 

L’olfaction, qu'en est-il réellement ?

Comme nous l’avons vu, l'étude de la fonction olfactive chez l’humain s'est initialement centrée sur la taille de son bulbe olfactif. Cependant, cette indication ne constitue pas un indicateur direct de la qualité du sens de l'odorat. Il semble que le nombre de neurones dans le bulbe offre une perspective plus pertinente. Malgré des ressemblances neuronales avec d'autres mammifères, le système olfactif humain se distingue par ses quelques 5600 glomérules dans le bulbe (plus que les souris), améliorant notre capacité à discerner les odeurs. Bien que la neurogenèse, c'est-à-dire la création de nouveaux neurones, fasse défaut dans le bulbe olfactif humain, une remarquable plasticité fonctionnelle persiste. De plus, les régions corticales, en particulier le cortex orbitofrontal, la partie du cerveau tout à l'avant du crâne, plus développé chez les humain·e·s, jouent un rôle clé dans l'interprétation des odeurs, les intégrant dans des réseaux sémantiques, permettant de donner sens et signification aux odeurs (McGann ; 2017).


En dépit des idées préconçues, le sens de l'odorat humain est tout sauf appauvri. Notre système olfactif est exceptionnel, surpassant largement la croyance populaire selon laquelle nous ne pouvons percevoir que 10 000 odeurs. Comparativement à d'autres espèces, notre sens de l'odorat se distingue, même si certaines nous surpassent dans ce domaine. En effet, nous, humain·e·s, partageons une compétence avec les "super-smellers", celle de pouvoir suivre un parfum dans une rue. Nous pouvons détecter de nombreuses substances volatiles, sommes capables de suivre des odeurs et, à l’image de l’œnologue ou de la personne parfumeuse, nous nous améliorons avec la pratique (J. Porter et al., 2007).

 

Les humain·e·s sont capables de détecter certaines odeurs à des concentrations aussi faibles que trois gouttes dans une piscine olympique (de Groot, 2017 ; Whisman et al. 1978 ; Yeshurun & Sobel, 2010). Des expériences (Sarrafchi et al, 2013) ont montré que nous étions extraordinaires pour certaines odeurs par rapport aux souris et aux singes, mais moins performant·e·s pour d'autres. Notre capacité à différencier les odeurs est estimée à plus d'un trillion de composés potentiels (McGann ; 2017), dépassant nos capacités à discriminer les couleurs (mais voir Meister, 2015). Tandis que les temps de réponse aux odeurs émotionnelles automatisées peuvent être aussi rapides que les temps de réponse dans le domaine visuel (He et al., 2014).

Cependant, environ la moitié des gènes responsables de la création des protéines réceptrices dans notre nez, détectant les odeurs, peut varier d'une personne à l'autre. Cela signifie que ces gènes présentent une certaine diversité génétique, un phénomène appelé polymorphisme. Au cours du développement embryonnaire humain, les récepteurs olfactifs, ces antennes olfactives, se placent un peu au hasard à la surface de notre nez. Ce positionnement aléatoire contribue à la singularité de chaque individu. La physiologie de l’odorat est donc unique à chaque être humain. Cependant, l’importante variabilité interindividuelle des descriptions olfactives n’est pas seulement due à cette variante anatomique. La manière dont chaque individu ressent et exprime ses perceptions olfactives dépendra du vécu, du vocabulaire, de la méthode de description, de l’entraînement, de l’environnement et de la personnalité (Pfister & Guyot 2006).

Nommer les odeurs :

Nous faisons face à un manque de vocabulaire pour décrire les odeurs. Souvent, nous les exprimons avec l'élément de base, par exemple : ça sent la banane. Pourtant, pour nos autres sens, nous disposons de mots spécifiques. Le nez du clown est rouge et non « couleur tomate », la caresse est douce et non « comme la main de maman », le son est strident et non comme « un enfant surexcité », le goût est sûr et non « a le goût de citron ».


Majid & Burenhult (2013) explorent les résultats sur la façon dont les personnes parviennent à décrire les odeurs en Europe (Pays-Bas). Iels expliquent que nous ne sommes pas capables de décrire environ 50% des odeurs, et que si nous avions un résultat similaire avec un autre sens, nous serions diagnostiqué·e·s « aphasiques » et conduits dans un centre de soins.

Bien que le problème de verbalisation des odeurs puisse être lié à la mauvaise relation entre le cortex piriforme et le réseau du langage (Smeets, 2014), la complexité à nommer et à conceptualiser les odeurs dans le monde occidental semble davantage résulter d'une lacune culturelle, par leur dévalorisation, que d'une limitation biologique.
Majid & Burenhult ont rencontré les « Jahai » en 2013, une communauté vivant en Malaisie, capable de coder les odeurs de manière plus abstraite et de les nommer aussi aisément que les couleurs. Dans une autre étude, Majid et Kruspe (2018) se sont penchées sur deux populations proches géographiquement toujours en Malaisie : les Semaq Beri, un groupe de nomades « chasseurs-cueilleurs », et les Semelai, pratiquant l'agriculture itinérante. Ces dernier·e·s étaient moins cohérent·e·s que le groupe de « chasseurs-cueilleurs » dans la nomination de couleur. Ces chercheu·r·euse·s en concluent que la culture façonne nos capacités linguistiques olfactives. Tandis que la rencontre avec un autre groupe de « chasseurs-cueilleurs », cette fois-ci vivant dans le Sud de la Thaïlande, a pu elle aussi  mettre en lumière l'influence culturelle dans l'olfaction (Wnuk & Majid, 2014).

 

Cela démontre qu’il y a, dans toute la perception de notre propre monde sensoriel olfactif, un facteur socio-culturel qu’il est important de prendre en compte.

L’olfaction et la communication :

Le système olfactif humain joue également un rôle majeur, parfois inconscient, dans la communication entre individus. Ce qui, il y a peu divisait la communauté scientifique- notre capacité à utiliser des signaux chimiques dans notre communication sociale- peut-être à présent confirmée (Lundström et al. 2010 ; Lübke et Pause, 2015). Chaque personne produit une odeur distincte qui reflète non seulement des facteurs alimentaires et environnementaux, mais permet de « capter » des informations génétiques permettant la discrimination entre les membres de la famille et les non-membres (Secundo et al., 2015 ; Milinski, et al., 2013). Elle pourrait aussi influencer le choix du/de la partenaire, ainsi que communiquer des informations sur l'anxiété et l'agressivité chez les autres (Lundström et al., 2010 ; Lübke et Pause, 2014). Le simple fait de serrer la main pourrait avoir une composante olfactive, car nous semblons inconsciemment sentir nos mains après cet acte social (Frumin et al., 2015).

Ainsi, même s’il nous reste encore beaucoup à comprendre et à étudier sur notre propre sens qu’est l’olfaction, on peut comprendre que notre odorat est bien plus complexe et important qu'on ne l'imagine généralement.

L’olfaction et les émotions :

Notre système olfactif, particulièrement sensible, façonne consciemment ou non nos comportements et émotions (Porter et al., 2007). En effet, nos comportements sont influencés par l'olfaction (Holland et al. 2005), et les odeurs environnementales peuvent déclencher des comportements d'approche et d'évitement, impacter le système nerveux autonome, façonner les perceptions du stress et des émotions, ou encore activer des souvenirs et des émotions spécifiques (Smeth et al, 2014 ; He et al, 2014). Rappelez-vous cette douce odeur qui, à elle seule, a la capacité de vous ramener 15 ans en arrière dans les bras de votre grand-mère ? Ou encore cette odeur de parfum qui, encore aujourd’hui, vous insupporte, en vous rappelant cet.te ex-partenaire ?

L’olfaction est parfois considérée comme le sens le plus émotionnel, avec une nature associative forte (Herz et al. 2004 ; Saive et al. 2015) et durable en comparaison aux autres sens, même chez les nouveau-nés (Delaunay et al. 2010).

Lorsque l’on souffre d’un trouble de stress post-traumatique, il n'est pas rare que des odeurs s'ajoutent aux symptômes, influençant ainsi notre façon de sentir et de parler des odeurs (Sareen, 2005). De plus, nos expériences personnelles peuvent également changer la façon dont nous percevons les odeurs, comme lorsque notre nez se met à réagir différemment après avoir vécu quelque chose de désagréable lié à une odeur (Li et al, 2008 ; Kass et al, 2013). Notre cerveau interprète les odeurs en fonction du moment, de ce à quoi on s'attend, et de ce qu'on a déjà vécu (Shepherd, 2004 ; Herz, 2001).

 

Conclusion :

Le monde olfactif est une fusion du présent et du passé. C'est la trace d'une personne qui est passée ici plus tôt, une empreinte de l'endroit où vous étiez cet après-midi, les conséquences d'un repas d'hier, et la personne que vous êtes aujourd'hui. Notre chien vit dans cette dimension, et ce monde est là… sous notre nez ! Tendons-le vers le vent, tentons de retourner dans le passé. Nous avons les moyens de le percevoir à certains moments, avec certaines odeurs. Profitons de ces instants pour comprendre la finesse avec laquelle ils utilisent leur truffe au quotidien.

 

Peut-être qu'au fond, sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, c'est le chien qui nous permettrait d'élargir nos compétences, de réaliser que nous aussi, nous avons un "super pouvoir". Oui, « l'élève » ne dépassera jamais « le maître », certes. Nous ne pourrons jamais sentir cette crotte humaine ou ce vieil os de poulet plus rapidement que lui, je ne vais pas vous mentir. Et l'idée de cet article n'était évidemment pas de prétendre que nos compétences sont égales, elles ne le seront jamais. Mais simplement de dire que le monde dans lequel notre chien vit ne doit pas être imaginé à 100%, car nous l'avons en nous. Nous communiquons en partie grâce à lui, peut-être inconsciemment, mais nous le faisons. Nos souvenirs se gravent avec ce sens, nous ramenant à des souvenirs émotionnels plus ou moins lointain.

Peut-être qu'en nous laissant aller à ce que nous sommes, des animaux, nous pourrions mieux comprendre en fin de compte le monde de nos propres chiens. Apprendre à connaître notre propre sens pour comprendre la finesse avec laquelle ils utilisent le leur au quotidien. Tenter d'utiliser notre propre nez plus souvent et plus consciemment, j'en suis certaine, peut nous apprendre la patience avec notre chien, voire même susciter l'admiration.

 

Enfin, j'ai envie de conclure avec cette citation de Socrate : « Connais-toi toi-même et tu connaîtras l'univers et ses Dieux », en la transformant à ma guise par : « Connais-toi toi-même et tu connaîtras SON univers... un peu mieux ».


Bibliographie:

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